Altar & Glitter -
par Leonor Comin
Chaussé de talons compensés extravagants, grimé tel une Madonne et portant un autel de fortune aux fleurs plastiques kitsch, Anthony entrait avec dignité dans la salle principale.
D'un pas fier mais hésitant, il vacillait sous le poids de l'autel qu'il avait entre les mains. Je me souviens de l'émotion que j'ai ressentie, les frissons des personnes présentes. Nous étions toutes connectées à lui. Nous ressentions la souffrance et la délivrance de chaque pas.
Une fois, il tremble. Le poids de l'autel et ses talons vertigineux ne font pas bon ménage. Il se ressaisit. Nous savons que chaque centimètre parcouru est autant de souffrance d'hésitation et d'affirmation pour lui. Pour nous tous. Nous sommes l'oeuvre que nous voyons déambuler devant nous.
Mon travail de commissaire m'a donné à voir et expérimenter tant de performances, mais celle-ci sera toujours gravée en moi car tout le hasard et la beauté nous ont, ce soir là, unis.
Et finalement, Anthony s'écroula de tout son long. Épuisé de tant de pas, de tant d'efforts. La foule resta muette, béate, en pleine ivresse d'art. L'extase commune eu raison de la tragédie qui venait d'arriver : les gens étaient persuadés que la chute avait été préméditée !
Au-delà de l'accident dont nous étions témoins, nous vivions surtout l'humanité et l'humilité de l'artiste.
La beauté de l'art d'Anthony se trouvera toujours dans l'inattendu, la spontanéité et l'audace qu'il a su apporter à l'exercice complexe de la performance.
Leonor Comin - Altar & Glitter.